L’histoire de cette croix remonte au voyage de Jacques Cartier lorsque, le 6 septembre 1535, il fit ancrer tout près d’ici ses trois navires (Grande-Hermine, Petite-Hermine, Émérillon), explora l’île et la dénomma « Isle-aux-Coudres » en raison de l’abondance des noisettes (fruit du coudrier).
Avant de reprendre son voyage, le 7 septembre 1535, le grand découvreur fit célébrer la messe par ses deux aumôniers, Dom Antoine et Dom Guillaume Le Breton. Ce fut la première messe célébrée à l’intérieur du Canada, appelé à l’époque « Neuve-France », dont l’histoire fasse mention.
« Le sixième jour du dit mois, vinsmes poser à une isle qui faict une petite baie et couche terre. Icelle isle contient environ trois lieues de long et deux de large : et une moult bonne terre et grasse, pleine de beaulx et grandz arbres de plusieurs sortes : et entre autre y a plusieurs couldres franches que trouvâmes fort chargées de noisilles aussi grosses et de meilleure saveur que les nôtres, mais un peu plus dures. Et par cela nommâmes l’Isle-es-Couldres.
Le septième jour du dit mois de septembre, jour Notre-Dame après avoir ouï la messe, nous partîmes de la dite Isle pour aller à mont ledit fleuve. »
Par la suite, l’endroit, connu des marins, servit à des fins de sépultures pour y déposer les personnes décédées au cours des longs et difficiles voyages en mer. On lui donna alors le nom de « Cimetière des Français ».
Cette croix rappelle donc tous les événements historiques des débuts de l’île et marque ce coin de terre privilégié qui peut être désigné à bon droit comme le berceau de l’île.
Au regard du voyageur, le paysage de l’Isle-aux-Coudres reflète l’attachement à la religion de ses habitants. Du village au champ, entre l’église et les habitations, un espace sacré se dessine. Des chapelles de procession, des grottes en l’honneur de la Vierge et de nombreuses croix de chemin font partie de l’environnement.
Ces croix sont d’une grande simplicité. Élevées pour différentes intentions, elles sont des témoins de la foi qui animait nos ancêtres. Ceux-ci voyaient en elles une influence protectrice, un lieu d’action de grâces et de prière.
La « Croix du Cap » est une des plus intéressantes de nos croix de chemin. Érigée en septembre 1957 à l’intention des marins par des gens du « Cap-à-la-Branche », cette croix, décorée au croisillon de motifs en fer forgé, fut pendant longtemps le guide de bien des navires. En descendant notre fleuve Saint-Laurent, les capitaines apercevaient, au soleil couché et à la lune éveillée, cette croix illuminée de près de cent lumières.
Et pourquoi donc à l’intention des marins ?
Évidemment, si le temps nous repousse aux année 1960, quel était celui qui, sur cette île, ne possédait pas un peu de sang marin... Ainsi, l’emplacement de la croix était particulièrement bien choisi, pour que le « guide spirituel » dirige ses navigateurs à bon port.
Aussi n’oublions pas qu’à l’origine, faute de ne pouvoir assister à la messe, on y récitait le chapelet presque tous les soirs, sans oublier le mois de Marie et les neuvaines pratiquées généralement tous les mois.
La présence de dix-sept croix de chemin à l’Isle-aux-Coudres démontre bien que cette coutume est toujours à l’honneur dans ce milieu. Ce circuit comporte donc un fort intérêt historique et ethnologique puisque les croix de chemin qui s’y retrouvent sont en bon état et demeurent objet de respect de la part de la population locale.
Que dire du paysage environnant, sinon qu’il est l’un des plus beaux points de mire de notre île...
D’ici nous apercevons Petite Rivière Saint-François et Baie Saint-Paul, nichées entre les montagnes charlevoisiennes et le fleuve. Au bord du Cap-à-la-Branche, nous faisons face au Cap-Maillard, au Cap-aux-Corbeaux et au Cap-aux-Rets. Plusieurs peintres ont immortalisé sur leurs toiles la beauté lumineuse des couchers et levers de soleil à cet endroit.
L’histoire de « la Roche à Caya » remonte au début du 19ème siècle, alors que, jadis, celle-ci s’attira toute l’affection d’un simple d’esprit, Alexis Lajoie, dit « Caya » qui était un homme assez étrange; on le craignait en raison de sa taille car il était grand, fort, robuste et très agressif.
Dans la mesure où nous pouvons interpréter cette légende, nous constatons qu’étant orphelin très jeune, sans véritable foyer et demeurant à proximité de là, Caya passa la plus grande partie de sa vie assis sur cette pierre, à regarder la mer...
Ainsi il nous est permis de croire que les circonstances ont favorisé le lien qui, à l’époque, existait entre Caya et cette roche. Il mourut à l’âge de 75 ans, laissant derrière lui l’histoire de sa roche. Il y aurait même laissé l’empreinte de son pied.
Une légende bien connue des insulaires raconte que le premier enfant né ici, la fille de Joseph et Marie Savard, les premiers habitants de l’île, aurait vu le jour près de cette roche.
L’histoire nous dit que le père serait allé chercher la sage-femme en canot à Petite-Rivière-Saint-François, car son épouse était sur le point d’accoucher. Marie aurait voulu se rendre près des berges de l’Islet afin de voir si son mari était sur le chemin du retour et, n’en pouvant plus d’attendre, elle aurait donné naissance à sa fille près de cette roche. Cette enfant, baptisée Brigitte, dut naître entre 1720 et 1725.
Depuis, tous les enfants de l’île naissent sous cette roche, dit-on. L’histoire se répète de famille en famille et reste, encore aujourd’hui, très présente dans la mémoire de bien des insulaires.
Le promontoire au pied duquel vous abordez a été jadis témoin d’une scène religieuse dont les habitants de l’île ont voulu perpétuer le souvenir.
Cette croix a été érigée en 1848, grâce à la piété d’un enfant de l’Isle-aux-Coudres (Monsieur l’Abbé Épiphane Lapointe, décédé en 1862) en mémoire du révérend Père de La Brosse qui fut, à l’époque, un des premiers missionnaires de l’île. Ce prêtre missionnaire de la compagnie de Jésus était français de naissance, natif de Maignac, paroisse de Jeauldes. Arrivé au Canada en 1754, il a parcouru dans ses courses apostoliques une grande partie de notre pays.
On ne saurait sortir de cette époque sans évoquer l’aimable légende qui se propagea après la mort du Père de La Brosse.
Le soir du 11 avril 1792, le Père Compain, curé de l’Isle-aux-Coudres, fut éveillé vers minuit par les cloches de son église qui s’étaient mises en branle et tintaient un glas. Tout de suite, il sut que le vieux curé de Tadoussac, le Père de La Brosse, venait d’expirer car celui-ci lui avait un jour prédit que cela se passerait ainsi.
Le lendemain, alors qu’il s’était dirigé vers le bout de l’île et scrutait la mer, le Père Compain vit s’approcher un canot avec deux hommes à son bord. Les canotiers emmenèrent le curé de l’île à Tadoussac. En route ils lui racontèrent les événements de la veille.
Le Père de La Brosse avait passé une agréable soirée avec ses amis au poste de traite de Tadoussac, racontant des anecdotes amusantes. À neuf heures, le Père se leva, les salua tous et leur dit :
« Mes bons amis, nous nous reverrons au ciel, mon travail est fini sur terre. Ce soir, à minuit, la cloche de la chapelle sonnera mon glas. Vous irez demain chercher le curé de l’Isle-aux-Coudres. Il vous attendra sur la rive et viendra m’ensevelir et chanter mon service funèbre. Même si la mer est grosse, n’ayez crainte, vous reviendrez sans misère, bonsoir. »
À minuit, la cloche de la chapelle de Tadoussac sonna, de même que celles de toutes les missions dont il avait été chargé auparavant. Les habitants se rendirent à l’église et ne touchèrent point à son corps, attendant l’arrivée du Père Compain de l’Isle-aux-Coudres. Lorsque les hommes avaient mis le canot à la mer pour se rendre à l’Isle-aux-Coudres, le vent s’était levé; mais pendant le voyage d’aller et de retour, un chenal calme se dessinait devant eux.
On apprit plus tard que dans toutes les autres missions du Père de La Brosse, à Chicoutimi, à l’Isle-Verte, aux Trois-Pistoles, à Rimouski et à la Baie-des-Chaleurs, les cloches sonnèrent d’elles-mêmes à minuit le jour de sa mort.
De tous les missionnaires qui ont exercé le saint ministère dans cette partie du pays, aucun n’a laissé un nom aussi populaire et vénéré que celui du Père de La Brosse. Tandis que les noms de tant d’apôtres qui ont évangélisé cette région à travers des dangers inouïs sont oubliés, celui du Père de la Brosse est resté vivant dans toutes les mémoires.
Êtes-vous de ceux qui ont été séduits par le naturel et la grande simplicité que dégage le film de Pierre Perrault illustrant une tradition bien de chez nous, la pêche aux marsouins.
Eh bien... sachez que c’est bel et bien ici, devant vous, à environ un mille et demi à l’extrémité ouest de l’île et aux abords de l’Islet, que s’exerçait cette pêche traditionnelle quand le fleuve était encore envahi de marsouins.
Évidemment, si l’histoire nous repousse à ses débuts, la pêche aux marsouins fut exploitée d’abord par les Amérindiens qui, les premiers, habitèrent l’île.
Pour la construction de la pêche, chacun des actionnaires devait couper et apporter cent dix perches (appelées localement « harts ») de sapin, d’épinette ou de bouleau de 18 à 20 pieds de hauteur, pour un total d’environ trois mille cinq cents perches. On enfonçait ces « harts » dans la vase à deux ou trois pieds d’intervalle, pour former une sorte de « C ». Trois hommes suffisaient pour planter à la main toutes les harts et le travail s’effectuait en quatre marées baissantes seulement.
Le marsouin remontait le fleuve, à la poursuite de bancs de capelans, jusqu’à Petite-Rivière-Saint-François. En redescendant, il était attiré par le courant à l’intérieur de la pêche. Apeuré par les vibrations des harts dans l’eau, il tournait en rond pour retrouver la sortie (orientée au nord-ouest) mais la forme de la pêche et le sens des courants l’en empêchaient. Pendant ce temps la marée baissait et il restait prisonnier; les insulaires récoltaient alors le fruit de leur travail.
« Le beau plaisir... » Quelle satisfaction, quel enthousiasme pour tous les insulaires qui, d’un oeil ébloui par un tel spectacle, regardaient au loin cette pêche fructueuse. Et bien souvent, on entendait la voix d’un insulaire bien connu criant : « ...Y’a du marsouin dans la pêche... ».
Cette fameuse pêche, construite vers la fin d’avril, restait en place toute la saison jusqu’à ce que les glaces arrachent les piquets. Il fallait donc la reconstruire à chaque année. Il semble que la plus fructueuse des prises fut celle de mai 1923, lorsque les propriétaires de la pêche capturèrent plus de cent vingt-cinq bélugas. Les années subséquentes, les prises diminuèrent de beaucoup et vers 1927, on cessa complètement de chasser à cet endroit. La pêche aux marsouins demeurera pendant plusieurs années, la plus importante pêche commerciale pratiquée à l’Isle-aux-Coudres. L’huile de marsouin devenait ainsi la source de revenu par excellence de l’île.
Puis vint l’année 1962...
« On parle sérieusement de ressusciter une industrie typique de l’île, à savoir, tendre cette année la pêche aux marsouins... s’exclama le bon vieux curé de Saint-Bernard lors d’un de ses sermons « convaincus-convaincants... »
Ainsi, cette année-là, la pêche aux marsouins fut tendue pour la réalisation d’un film intitulé « ...POUR LA SUITE DU MONDE... » réalisé par Pierre Perrault. On continua donc de la tendre jusqu’en 1966 et pendant ces cinq années, seize marsouins auraient été capturés. La dernière année où elle fut relevée a été en 1979 mais on ne captura aucun marsouin.
« ...POUR LA SUITE DU MONDE... »
Jamais le passé n’avait été aussi bien décrit, imagé, raconté par des acteurs et actrices de l’île qui, sans le savoir, le sont demeurés jusqu’à ce jour...
Et que dire de ... « BLANCHON »...
« BLANCHON », non donné par les insulaires pour désigner le marsouin. « Blanchon », qui fut la principale vedette de ce film, fut amené alors à l’Aquarium de New York, lieu où il se trouva privé de son fleuve natal, pendant plus de vingt ans, afin de pouvoir « parler de l’Isle-aux-Coudres en Amérique... » Blanchon (1962-1983) devenait donc, par l’intermédiaire du film, le héros de tout un monde insulaire, fier de l’être...
Les années passent et passent encore.... Reste le « marsouin » de l’île, nom donné aux insulaires en raison de toute l’histoire entourant ces fameuses pêches... Reste l’âme de « BLANCHON »... Restent le souvenir, l’image, le son du marsouin pris dans cette pêche légendaire.
Reste le surnom que l’on nous donne, le nom de ce marsouin qui nous va si bien...
Chapelle occidentale, construite à l’endroit appelé « Anse des grandes mares » pour la célébration de la Fête-Dieu, elle fut consacrée à Sainte-Anne et était un des éléments importants de la vie religieuse des résidants de ce village.
L’intérieur de cette chapelle se pare d’un tabernacle orné d’un vase de roses placé entre deux pilastres corinthiens. Sur le dessus du tabernacle, on voit la statue de Saint-Pierre, des clés dans la main droite, un parchemin dans la main gauche et un coq à ses pieds.
Construite en pierres des champs jointoyées au mortier, elle s’ouvre au sud par une grande porte à deux battants que coiffe une fenêtre demi-circulaire. Le pignon supporte un élégant clocheton formé d’une base rectangulaire que surmontent une délicate arcature et une large flèche au profil incurvé. La chapelle Saint-Pierre a été érigée le 25 mai 1837 et classée monument historique le 30 juin 1961.
Aujourd’hui encore, cette chapelle attire le regard de bien des passants et continue de perpétuer une belle histoire religieuse.
CHANT ANGÉLIQUE
(Français-Latin)
« Devant un si grand sacrement, « Tantum ergo sacramentum
Prosternons-nous et adorons. Venerémur cernui
Que le Testament ancien Et antiquum documéntum
Cède la place au nouveau, Novo cédat rétui;
Et que la foi nous introduise Prastet fides suppleméntum
Là où le sens ne peut aller. Sénsuum deféctui.
À Dieu le Père et à son Fils Genitori Genitoque
Louange et joie éternelles, Laus et iubilàtio,
Salut, puissance , honneur et gloire Salus, honor, virtus quoque
Et toute bénédiction. Sit et benedictio;
Louange égale au Saint-Esprit Procedénti ab utroque
Procédant du Père et du Fils ». Compar sit laudatio. Amen. »
La chapelle Saint-Isidore, ou chapelle orientale, a été consacrée sous l’invocation de la Sainte-Vierge. Utilisée lors des célébrations de la Fête-Dieu, elle est la première de deux chapelles de procession.
Elle est construite dans « l’Anse de l’Attente », appelée ainsi parce qu’autrefois, les embarcations y attendaient le bon vent ou l’appoint de la marée. Le tabernacle de l’intérieur de la chapelle proviendrait de l’église du 18ème siècle et aurait été commandé à l’atelier des Levasseur. Une moulure d’oves (ornement en forme d’oeuf) décore le haut du fronton cintré et une moulure de rai-de-coeur (ornement composé de feuilles aiguës en forme de coeur alternant avec des fers de lance) souligne le bas de la porte, dont le décor consiste en un bas-relief doré représentant « Jésus au Jardin des Oliviers. »
Ce tabernacle fait partie aujourd’hui des objets historiques sacrés de l’église de Saint-Louis car c’est maintenant à cet endroit qu’il est installé.
Depuis le 13 novembre 1836, date où elle fut érigée, cette réplique miniaturisée de la maison de Dieu, est un des joyaux du patrimoine de l’Isle-aux-Coudres.
La fierté et la foi des résidants de ce village garderont sûrement cette chapelle belle et fleurie...
SALUTATION ANGÉLIQUE
(« Je vous salue Marie », Français-Latin )
« Je vous salue, Marie, pleine de grâce; le Seigneur est avec vous; vous êtes bénie entre toutes les femmes, et Jésus, le fruit de vos entrailles, est béni. Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous, pauvres pécheurs, maintenant et à l’heure de notre mort. Ainsi soit-il. »
« Ave, Maria, gratiâ plena; Dominus tecum : benedicta tu in mulieribus, et benedictus fructus ventris tui, Jesus. Santa Maria, Mater Dei, ora pro nobis peccatoribus, nunc et in horâ mortis nostrae. Amen. »
Les insulaires emploient le terme « pilier » pour désigner les récifs de forte taille qui entourent l’île. Celui que vous apercevez fait l’objet de bien belles histoires...
Longtemps avant que l’on donne le nom de « La Baleine » à la localité voisine, au début du 18ème siècle, on raconte qu’une première baleine de 18 pieds de longueur se serait échouée à cet endroit. Un certain Bouchard aurait vu le mammifère en difficulté en allant couper son champ de blé. Voyant la baleine sur le point d’assécher, il se précipita chez ses voisins pour demander du renfort afin de lui porter secours.
Trop tard.... la baleine, à l’arrivée des sauveteurs, était déjà morte. Les hommes la débitèrent, firent fondre la graisse et obtinrent environ 28 barils d’huile. Cette huile était utilisée pour le cirage des bottes, faites le plus souvent en peau de marsouins, et aussi pour graisser les engrenages des moulins.
Même lors des plus hautes marées, l’eau du fleuve ne couvre pas ce rocher. Avec les années et l’érosion causée par les glaces, le rocher aurait, dit-on, perdu le tiers de son volume.
Aussi, le temps s’est chargé de lui faire prendre la forme d’un visage d’Indien, vu de côté. Depuis une trentaine d’années, les chasseurs de l’île l’ont baptisé le « Vieil Indien ». On dit aussi de lui que, du coin de l’oeil, il nous surveille et devient, par le fait même, le protecteur de notre île...
Un aîné de l’île raconte qu’autrefois, les fermiers allaient autour du rocher pour arracher du varech afin d’engraisser les patates. Comme l’eau du fleuve était à marée basse, à « maigre d’eau » comme le dit si bien cet insulaire, ils marchaient sur des poissons appelés « plies » qui leur chatouillaient les pieds.
Il ne faudrait pas passer sous silence le danger que peut comporter une visite près du « Vieil Indien ». Ainsi, pour éviter le moindre accident il faut, bien entendu, tenir compte de la marée. La marée basse complète est le moment idéal pour aller voir le rocher mais celle-ci dure moins de deux heures puisque près des berges de l’île, l’eau du fleuve remonte plus rapidement.
Il y a de cela environ 30 ans, quatre passants eurent l’idée d’aller voir de plus près le grand rocher. Ne connaissant pas la vitesse de remontée de la marée, ils furent alors prisonniers du « Vieil Indien » et encerclés par des eaux trop profondes pour revenir à pied. Un insulaire qui passait par là entendit et vit les quatre voyageurs. Il prit son vieux canot et alla les secourir.
Mais attention ! N’allez surtout pas croire qu’il y a toujours un bon « samaritain » au bon moment. Si vous tenez à vous rendre près du rocher, essayez de faire un clin d’oeil à un insulaire qui pourrait vous y conduire en toute sécurité....
Comme celles du golfe, les eaux du fleuve, au printemps, regorgent de poissons, alors que de nombreuses espèces anadromes remontent pour gagner le lieu du frai. Ces poissons sont alors l’objet d’une pêche intensive, sur la rive nord et sur la rive sud. Pour ce faire, on utilise un procédé à la fois ingénieux et primitif qui compte sur le jeu des fortes marées du fleuve, « la pêche à fascines. »
Les petites pêches fixes de rivage à l’Isle-aux-Coudres étaient utilisées pour capturer les diverses espèces de poissons qui fréquentent les battures de l’île, spécialement l’anguille. Ce type de pêches était accessible à la majorité des ménages. Ces pêches à fascines étaient généralement installées à proximité de la demeure du propriétaire. Peu coûteuses, elles pouvaient être facilement récupérées à la fin de la saison.
La fabrication de ces fascines (« ailerons ») s’effectuait en entrelaçant les « harts »* de manière à ce qu’elles ne laissent aucun espace. Pour tendre la pêche, l’utilisation de ces « ailerons » était bien simple; six « ailerons » droits de dix pieds de longueur et quelques-uns courbés (de manière à former un « C ») étaient nécessaires afin d’emprisonner les poissons dans les coffres placés à cette fin.
Les pêches à fascines servaient également à recueillir les plantes marines appelées aussi « varech ». Le varech servait quelquefois d’engrais pour les champs.
Rien de mieux que de visualiser vous-mêmes ces « ailerons » afin de comprendre le processus d’emprisonnement des poissons. Voici donc sur le site un exemple « d’aileron » qui servait autrefois à constituer la pêche à fascines. Si vraiment cette pêche vous ... « fascine »... les vacances d’automne vous offriront ce spectacle unique à ne pas manquer... à la manière d’aujourd’hui !
*Hart : appelée aussi perche.
« Cet été-là, en 1805, Charles Desgagnés, à la tête de ses hommes de mer, allait entreprendre plus tôt que d’habitude son voyage vers les « vieux pays »; il voulait être revenu à l’Isle-aux-Coudres vers les derniers beaux jours de septembre pour se marier. À la fin de mai, son trois-mâts chargé de bois carré était prêt pour le départ. Après une soirée passée à danser, les membres de l’équipage faisaient leurs adieux..
La fiancée de Charles, elle, passa l’été à préparer le logis déjà construit sur la pointe de l’île, puisque c’est là qu’ils iraient habiter après leur mariage. À la fin de septembre, son trousseau était terminé et elle commençait à trouver le temps long. Pas un après-midi ne se passait sans qu’elle n’aille s’asseoir sur une pierre en bordure de la mer. Le soir, elle revenait lentement chez son père qui lui répétait que certains voiliers aux prises avec une mer sans vent mirent encore plus de temps à faire le voyage. Quand le temps se fut refroidi et que les volées d’outardes eurent fini de passer au-dessus de l’île, Louise dut se contenter de scruter la mer par la fenêtre du pignon.
Ce fut un long hiver sans divertissement et dès que les glaces disparurent, elle prit l’habitude de passer tout le jour sur la pointe de l’île, pleurant et se racontant ses peines à voix basse. Un soir de mai, Louise ne rentra point chez elle. Pendant plusieurs jours, tous les habitants se mirent à sa recherche. Un matin, enjambant de hautes touffes d’herbes de mer, son père s’arrêta longuement à regarder une grosse pierre entourée de fleurs sauvages sous laquelle s’échappait un filet d’eau. Après avoir posé sa tête sur le grand caillou, il fit signe aux hommes de regagner leur logis.
Louise, transformée en pierre, pleure depuis lors, en toutes saisons, son fiancé perdu en mer.
Plusieurs années se sont écoulées depuis cette légende de « La Roche Pleureuse ». La tradition a cru devoir conserver ce nom quoique le premier qui a cru que cette pierre pleurait réellement n’avait pas aperçu la petite ouverture par où l’eau passait. Il s’est imaginé que l’eau qu’il apercevait sortait à travers cette pierre et coulait sur elle, comme des pleurs qui sortent des yeux coulent sur les joues.
Ayant fait cette découverte, il l’a communiquée à d’autres qui l’ont acceptée avec confiance et l’ont fait passer dans les traditions de l’Isle-aux-Coudres.
L’Isle-aux-Coudres, ce n’est pas seulement une île de paix où le calme épouse harmonieusement le bruit des vagues du majestueux Saint-Laurent, c’est aussi une île pleine d’histoires toutes aussi charmantes et fabuleuses les unes que les autres. En voici la preuve...
Ce fut une journée d’émoi et de mouvement dans l’île que celle du 27 novembre 1832.
L’hiver avait été précoce cette année-là : dès la mi-novembre, le fleuve charriait déjà des champs de glaces. Un brick anglais, le « ROSELIND », commandé par le capitaine Boyle, était parti de Québec avec une riche cargaison pour l’Angleterre.
Dans la traversée de Saint-Roch, il fut emprisonné dans une banquise et entraîné par les courants vers les battures à l’est de l’île. L’équipage s’y trouvait exposé aux plus grands dangers si l’on ne venait pas en toute hâte à son secours.
C’était une belle occasion pour les gens de l’île de montrer leur générosité. Ils ne furent pas au-dessous de leur réputation. Grâce à leurs courageux efforts et à ceux de leur curé, Monsieur Asselin, qui s’était mis à leur tête, les naufragés et la cargaison du navire purent être sauvés.
Tous les marins du « ROSELIND » hivernèrent dans l’île. Ils furent hébergés chez les insulaires et traités avec un soin et une honnêteté dont ils gardèrent le souvenir.
En guise de reconnaissance à leurs sauveteurs, le capitaine et les propriétaires de ce brick firent parvenir à l’abbé Asselin, un beau témoignage gravé sur une aiguière d’argent. Ce présent a été légué par la suite à l’archevêché de Québec. On pouvait y lire l’inscription suivante:
« Tribut de respect et de reconnaissance offert par les propriétaires et assureurs du brick ROSELIND, de Londres et le capitaine Boyle au Révérend messire Asselin, prêtre, curé de Saint-Louis de l’Isle-aux-Coudres, pour avoir, par son exemple, encouragé ses paroissiens à aider à sauver le vaisseau et sa cargaison jetés par les glaces sur cette île le 27 novembre 1832 et pour ses bontés envers les naufragés pendant leur séjour sur l’île »
Là où vous êtes, les montagnes des « Éboulements » et la pointe du « Cap-aux-Oies » ne sont qu’un avant-goût du paysage qui entoure notre île.
À la pointe du « bout d’en bas », nommée ainsi par les premiers insulaires par opposition à l’autre extrémité de l’île que l’on nomme « le bout d’en haut », on voit la statue de Notre-Dame de l’Assomption. Elle rappelle aux visiteurs l’incroyable guérison d’un insulaire qui, en guise de remerciement à la Madone, l’érigea au printemps de l’année 1960. Il n’avait pas de préférence pour le site mais l’histoire favorisait cet emplacement en raison des nombreuses anecdotes de naufrages et de légendes de marins.
Les années se sont écoulées et l’histoire de la Madone parvint aux oreilles de gens de l’extérieur de l’île qui firent peindre la base de la statue et vinrent poser des fleurs à ses pieds, en guise de remerciements pour faveurs obtenues.
Seule l’intervention de la foudre pouvait détruire cette statue, construite en granite synthétique. Cependant, une mince partie de son corps fut malheureusement l’objet d’un tir accidentel de chasseurs.
Mais revenons à cet insulaire guéri : « Je suis heureux que cette Madone ait pu aider bien des gens et ce , même encore aujourd’hui. Mais vous savez... on n’achète pas les saints lorsqu’on est malade... »
Il faut avoir la foi, il faut avoir la confiance, il faut avoir une loi... celle de l’espérance.